Chapitre 2 – Le sexe
Une énergie vitale mal comprise
Parmi tous les besoins humains, la sexualité mérite qu’on s’y arrête avec attention. Elle est au croisement du corps, de l’esprit et du lien à l’autre. Outil prodigieux inventé par la vie pour permettre la reproduction des espèces, le sexe n’est ni sale, ni honteux. Il est aussi naturel que manger, boire ou respirer. Il est source d’énergie, d’apaisement et de vitalité.
Et pourtant, malgré son universalité, la sexualité reste l’un des grands tabous de notre société.
Une ressource convoitée et régulée
Comme les animaux, les humains se battent pour satisfaire leurs besoins. Cela concerne les ressources matérielles, mais aussi… la sexualité. Dans l’histoire de l’humanité, le sexe a été source de conflits, de convoitise, de frustration et de violence.
La vie en société a donc imposé des règles : on ne peut pas imposer la sexualité par la force, et le consentement devient une condition fondamentale. Le viol, utilisé comme arme de guerre ou comme outil de domination, illustre tragiquement les dérives de cette pulsion mal canalisée.
Les religions, elles, ont tenté de contenir la sexualité. Hors mariage, elle est souvent considérée comme un péché. Pourtant, la répression ne suffit pas. Prostitution, déviances, abus… La sexualité refoulée se déploie ailleurs, parfois dans la transgression.
Je l’ai vu de mes propres yeux : certains prêtres qui prêchaient la chasteté s’abandonnaient à des comportements contraires à leur enseignement, parfois même destructeurs pour autrui.
Une gêne culturelle persistante
Malgré les évolutions sociales, un malaise persiste autour de la sexualité. Parler de sexe entre parents et enfants reste rare. On considère que la sexualité des autres — même celle de nos proches — devrait rester invisible. On réagit avec gêne devant deux amoureux qui s’embrassent passionnément dans la rue.
Pourquoi ce malaise ? Pourquoi cette distance face à l’expression du désir ? Peut-être parce que nous avons appris à séparer le sexe du reste de la vie émotionnelle, à le cacher, à le taire, à l’enfermer dans l’intimité.
Et pourtant, dans le couple, sexualité et communication sont souvent liées. Une vie sexuelle insatisfaisante peut révéler un dysfonctionnement plus global… et inversement.
La testostérone et le vieillissement
La libido est en grande partie régulée par une hormone : la testostérone. Elle agit tant chez les hommes que chez les femmes, même si son rôle est souvent minimisé dans le cas féminin.
L’adolescence marque l’âge d’or de la testostérone, avec une intensité qui déstabilise. L’andropause chez les hommes, tout comme la ménopause chez les femmes, correspond souvent à une chute de cette hormone, et donc à un changement dans la sexualité.
Chez les femmes, une hormonothérapie peut parfois être proposée. Chez les hommes, c’est plus rare, car les risques (notamment de cancer) sont plus élevés. La testostérone n’est prescrite qu’en cas de chute avérée et de réelle détérioration de la qualité de vie.
Les médicaments comme le Viagra agissent sur la mécanique — la circulation sanguine — mais pas sur le désir, qui demeure le domaine exclusif de la testostérone.
Or, une activité sexuelle régulière, une activité physique soutenue, et surtout une vie affective équilibrée contribuent naturellement à maintenir un bon niveau hormonal.
Plus on est actif sexuellement, plus on le reste. Moins on l’est… plus le désir s’éteint. C’est un défi réel pour les personnes âgées, célibataires ou sédentaires, qui parfois se dévitalisent faute d’intimité.
Une vision chinoise intéressante
J’ai découvert une conception chinoise du sexe qui m’a marqué. Elle postule que chacun possède un niveau optimal de fréquence sexuelle. Si on le dépasse, on épuise ses énergies vitales. Si on ne l’atteint pas, on se tend, on se déséquilibre.
Ce modèle permet une approche plus nuancée, plus respectueuse de chacun. Il reconnaît le besoin de satisfaction, sans pour autant glorifier la performance.
Dans cette optique, la masturbation est vue comme un moyen légitime de réguler la tension sexuelle. Mais, dans la tradition chrétienne, ces désirs doivent être transformés en engagement, en prière, en service. La chasteté y est valorisée… même si, là encore, peu de membres du clergé y parviennent sans difficulté.
Le concept des intimités
Nous possédons tous une zone intime, une sorte d’aura invisible. Lorsqu’une autre personne s’en approche, nous réagissons. Si elle ne respecte pas cette distance, elle viole symboliquement notre espace personnel.
C’est pourquoi la progression vers la sexualité doit se faire par étapes, dans un climat de confiance : un sourire, une parole, une accolade, une caresse… jusqu’à l’union, mais toujours avec le consentement mutuel et l’attention à l’autre.
Malheureusement, dans de nombreux couples, cette progression est négligée. L’homme, souvent dominé par son désir immédiat, brûle les étapes. Il saute les préliminaires, précipite l’acte, et repart… sans percevoir le vide qu’il laisse derrière lui.
La femme, blessée dans son intimité, n’ose pas toujours dire ce qu’elle ressent. Elle aime, alors elle pardonne. Mais les blessures s’accumulent.
Ce n’est pas la sexualité en soi qui pose problème, mais le manque de considération, de dialogue, de lenteur, de présence. Et cela abîme le lien.
La solution : éduquer, nommer, partager
Comprendre la différence entre le sexe et l’amour est une leçon de maturité. Elle ne s’apprend pas dans les livres, ni dans les films. Elle s’apprend en vécu, en erreurs, en rencontres.
Mais pour devenir véritablement compétents dans notre vie sexuelle, il faut mettre des mots sur nos expériences. Il faut en parler. Il faut apprendre.
Et là encore… ce n’est pas facile. La culture, les traditions, les interdits religieux pèsent lourd. Dans beaucoup de familles, le sexe est tu. On n’en parle pas avec ses enfants. Et quand on le fait, on se limite à la mécanique, jamais aux émotions. Or, ce sont justement les émotions et les sentiments qui fondent une sexualité épanouie.
Ce qu’il faut retenir
● La sexualité est une composante naturelle, essentielle et vitale de la vie humaine.
● Elle peut être source d’épanouissement ou de souffrance, selon qu’elle est vécue dans le respect ou dans la précipitation.
● La testostérone joue un rôle fondamental dans le désir sexuel, et son maintien dépend autant de la physiologie que de la qualité relationnelle.
● La communication dans le couple sur le sujet du sexe est indispensable, mais souvent négligée.
● Respecter l’intimité de l’autre, prendre le temps, écouter, exprimer ses ressentis sont les clés d’une sexualité harmonieuse.
● La compétence sexuelle ne s’improvise pas : elle s’apprend, se nomme, se cultive.